Un fils de notre temps

Mariant marionnettes et vidéo, une adaptation sensible et inventive et qui fait résonner aujourd’hui le roman d’Ödön von Horváth, écrit dans les années 30 et décrivant les espoirs et les désillusions d’un jeune chômeur s’engageant dans l’armée.

D’étonnantes marionnettes manipulées par quatre acteurs dans l’ambiance expressionniste d’une fête foraine racontent l’histoire d’un fils de notre temps. Un jeune homme au chômage s’engage dans l’armée pour fuir son désespoir. Dans les rangs bien alignés de son bataillon, il parvient à ravaler son sentiment d’humiliation et goûte au bonheur de l’uniforme et de la reconnaissance. Mais le monde du jeune fantassin chavire lorsque son capitaine meurt au combat. Blessé à son tour, il est renvoyé et se raccroche au souvenir d’une femme entr’aperçue au guichet d’un château hanté à la fête foraine, un jour de permission. En quête de cet amour chimérique, errant au milieu de cette humanité en ruines qui l’entoure, il prendra peu à peu conscience de l’iniquité du régime auquel il s’est livré corps et âme…

Un fils de notre temps d’Ödön von Horváth dépeint la fragilité de l’individu face à une société désenchantée, au bord du gouffre. Écrit à la première personne et au présent, ce récit décrit sans jugement et sans dénonciation les doutes, les désirs et les hésitations de son personnage. Isabelle Matter adapte le célèbre roman en mettant en scène la vie intérieure du jeune héros. Dans un palais des glaces labyrinthique, symbole de son monde intime, ses espoirs, ses fantasmes et ses souvenirs s’allument comme des fenêtres éclairées dans la nuit. Porté par une mise en scène qui fait appel à toute l’inventivité permise par les marionnettes et la vidéo, le texte résonne avec les incertitudes et les tentations de violence de la jeunesse d’hier et d’aujourd’hui.